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  • Photo du rédacteurMOTHER MOÏRA

Essais d'un récit Maternel - Extrait n°1

Dernière mise à jour : 29 août 2020



Annegret Soltau, "- mit Tochter (avec sa fille)", de la série "Mutter-Glück" (Maternité). Retouches photo. Face avant et arrière.1977-86.


J'ai écrit ce texte le 16 octobre 2019.

Les souvenirs et l'inspiration me sont parvenus lors de mon analyse du livre d'Annie Ernaux : "Une Femme". (1) Livre qui m'a littéralement bouleversée.



"Ma mère venait à l’origine d’un milieu bourgeois.

Sa mère avait été élevée et éduquée pour être "une dame de salon" et son père était pêcheur professionnel, il fût même de son temps champion national.

Elle fut d’ailleurs principalement élevée par sa grand-mère durant sa petite enfance, car ses parents voyageaient régulièrement dans le cadre des compétitions de pêche.

Ses grands-parents étaient d’aisés bourgeois. Elle était “la petite fille du bourgmestre” de Montegnée.


Puis ma grand-mère quitta le foyer pour fuir les adultères et les violences répétés.

Ma mère et elle se retrouvèrent seules sans-le-sou. Pour subvenir à leurs besoins, elles devinrent commerçantes. Plusieurs fois en faillites, cette activité n’était vraiment pas très fructueuse. Elles prirent toutes deux l’habitude de compter chaque centime.


Divers commerces, voyages, trois hommes et trois enfants plus tard, le niveau de vie de la famille est au plus bas. Je ne connais pas assez les tenants et aboutissants de cette chute social et économique, mais je sais en revanche que ma naissance à contribuer d’une manière ou d’une autre à fixer cette situation.


Je n’ai jamais eu ni maison avec jardin, ni voiture, ni restaurant en famille. Rarement des jouets neufs, souvent obtenu par les dons sociaux. J’étais rhabillé deux fois l’année en période de soldes exclusivement avec budget restreint(il en fallait aussi pour ma sœur.).

Ma mère, elle, ne s’était plus rien acheté depuis notre naissance, car nous étions la priorité.

À l’adolescence, je n’ai cessé de la critiquer, à la limite de l’humiliation, pour avoir gardé les mêmes vieilles friches sur elle, ne supportant pas d'être vue à ses côtés en pareil tenue.

Ma mère elle, ne se souciait guère du regard des autres et d’être “au CPAS”. Tout ce qu’elle voulait, c’est que ses enfants soient cultivés, érudits et “réussissent dans la vie”. Pour tous (notre fratrie), cela passa par des études dans l’institut d’enseignement le plus élitiste de la ville.


Ceci ne fit que creuser le fossé entre ma vie et la vie des autres.


Ce qui conduisit à de vifs reproches durant des années de ma part envers ma mère, de ne pas avoir fait, ou faire en sorte que nous soyons “comme les autres”.

À défaut de se sentir méprisé par les autres (qu’elle ne côtoyait pas, puisque toujours chez elle), elle était méprisée par sa propre fille cadette (moi) au sein même de son foyer.

Et pourtant, elle continuait de me pousser, avec le peu de force qu’il lui restait, vers ce monde de la connaissance et de la réussite. Ce monde grâce auquel je pourrais peut-être nous sauver.

Elle portait beaucoup d’espoir en moi pour nous sortir un jour de notre misère, et nous offrir le rêve de la maison avec jardin et de la famille heureuse et réunie.

Ce rêve, je lui avais promis, petite fille. Il ne vient pas d’elle.

Il y a beaucoup de rêves que je lui ai promis et que j’ai violemment brisés par la suite de mes petites mains.


À maintes reprises, je l’ai cassée."


(1) ERNAUX Annie,Une Femme, Paris, Gallimard, 1987.

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1 Comment


dc.kath
Apr 10, 2020

❤️

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